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Ruisseau de vie
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12 août 2006

En tout évidence, dans ma continuité...

TOUR

 

On roule et on parle. Mes yeux capturent les images mais mes paroles sont incessantes, dans un débit intense, comme un flot qui effleure les frontières de la légèreté. Alors, évidemment, en levant les yeux sur cette montagne de fer, avec le ciel bleu parsemé de coton à la couleur prémices d’un automne qui n’est pas si loin, je veux que l’on s’arrête, là tout de suite pour sortir mon appareil et prendre cette image imposante.

Elan m’est donné de bondir hors de la voiture pour prendre mon temps et ouvrir grand mes yeux sur cet instant beauté, le véhicule sera stationné pas très loin pour m’attendre et repartir à la conquête de cet espace.

Je cours, je m’arrête, je scrute, je fixe, je mitraille. Plus j’avance et plus je sens l’air se conjuguer à l’architecture pachydermique, ne se souciant aucunement de la foule impressionnante de touristes. J’ai l’impression de valser avec les courbes grises et froides, en même temps. Je suis petite dans cet univers magique. Je me sens bien, rieuse, légère et minuscule sous le ventre de cette monstrueuse dame. Je me dis enfin qu’il est temps de s'en retourner, bientôt je vais quitter ce sol inhabituel.

Mon appareil est suspendu autour de mon cou. J’ai les mains libres, pas de sac, rien… J’avance à pas rapides vers la station d’arrêt des bus et je ne l’aperçois pas. Bien sûr, on lui a certainement demandé de changer de place, des bonshommes au regard noir, imbus d’eux-mêmes puisque détenteur de la sécurité de la grande ville. J’avance vite mais je suis tranquille. Et puis j’ai envie d’une cigarette et je cherche machinalement mon sac pour les prendre. Je réalise soudain qu’il est resté dans la voiture. Avec tout. Le téléphone. Je ne connais aucun numéro par cœur. Les billets de train pour le retour tout à l’heure. Mon porte feuille, mon identité, ma carte bancaire. Mince, je n’ai bientôt plus de batterie dans mon appareil. Y’en a dans ma sacoche. Elle est aussi avec le reste. Je regarde vers le pont, je sens la foule plus nombreuse encore, plus dense, moins douce, plus hostile presque. Je me répète que je ne suis pas perdue mais je ne sais pas ce que je vais faire si… Je scrute l’horizon, je m’imagine là, encore ce soir, attendant que quelqu’un vienne me chercher. Mais qui ? Puisque je suis au milieu du monde comme coupée de lui. J’oscille entre ne garder que ces trois jours doux à l’esprit, me raccrocher à la confiance évidente, ou à élaborer beaucoup trop vite un mauvais roman noir, façon la fille qui va être exportée par des malfrats à l’étranger. Mon ventre se tord, j’ai froid tout à coup sous ce soleil de plomb. J’ai le sentiment que l’on a vu mon désarroi et que l’on va venir me retirer de la scène, pour ne pas l’entacher. On est si peu de chose.

En une seconde, je réalise que ma panique n’arrivera pas à son comble car en face, il klaxonne. Il sait très bien ce que je ressens, il a deviné cette peur qui vient de me faire fondre sur le champ. Je ferme les yeux, le temps d’un demi tour, il s’arrête à toute vitesse devant moi, je me réfugie dans l’habitacle de la voiture.

« Tu as eu peur ?

- Non, pas vraiment, enfin... si..., oui..., vraiment…! »

Et j’éclate en sanglot de gros bébé avec des larmes qui jaillissent d’un coup, je ne cache pas la terreur que je viens d’éprouver. Il est désolé bien sûr. Surtout qu’il a, à ce moment, l’étrange sensation de me connaître complètement.

Mon ondée réparatrice passe vite et nous repartons à l’assaut des endroits connus. A peine quelques secondes plus tard et j’impose à nouveau que l’on s’arrête comme ça, au milieu de la route pour dérober à la capitale ses couleurs et ses formes, les figer sur ma mémoire, sur mon écran personnel, ma vie qui se déroule, simple et limpide, comme ce carrefour évident parsemé de contre temps incongrus, mais cela n’a aucune importance, puisque je suis bien plus forte que tout ça, de plus en plus.

On m’avait bien dit que mon été serait magnifique.

Mais on ne m’avait pas averti que je me régalerais autant…

Très humblement : Merci.

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Commentaires
A
Quel genre d'homme aurait pu vous abandonner là, a cet instant, après ces trois jours, comme vous le dite d'une douceur qui imparablement vous ont plu.<br /> <br /> aurait-il du prendre un coup de mitraillette pour vous faire comprendre qu'il a cette étrange sensation de vous connaît depuis toujours ???
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